Conférence du 8 novembre 2023, par M. Basile Pauthier, responsable du projet Agrométéo au pôle technique du Comité champagne
Belle affluence, même France 3 a fait le déplacement, pour la conférence de Basile Pauthier sur le thème Champagne et changement climatique. Docteur en climatologie, M. Pauthier maitrise son sujet à la perfection.
Dans une brève introduction, il rappelle l’importance économique du champagne qui, dans l’Aube, avec ses 7 800 ha de vigne, rapporte autant que les 320 000 ha consacrés aux autres productions agricoles. Puis avant de parler climat, il tient à préciser la différence entre météo, état de l’atmosphère à un moment donné, et climat, synthèse des conditions météo sur le long terme. Les deux périodes de référence choisies pour son étude sont 1961-1990 et 1991-2020.
Le vignoble de Champagne est un vignoble septentrional sous double influence océanique et continentale qui lui confèrent un climat globalement frais avec des périodes de gel mais qui évolue lentement vers un climat méditerranéen du fait des concentrations des gaz à effet de serre, notamment du CO2. Entre les deux périodes de référence la température moyenne a augmenté de 1,3°C et si les scénarios du GIEC se vérifient, elles pourraient « gagner » 4 à 5°C d’ici 2100.
Des nombreux relevés à Épernay présentés par M. Pauthier, il ressort que la « rupture climatique » se situe en 1987. En effet à partir de cette date, le changement est spectaculaire. Il apparait sur tous les graphiques, courbe des températures, nombre de jours à plus de 30 puis 35°C, dates des vendanges de plus en plus précoces, hausse du degré alcoolique, baisse de l’acidité des vins, cette dernière étant pourtant la « marque » du champagne.
Si la hausse des températures peut apparaitre comme globalement positive pour la vigne, plante méditerranéenne comme l’a rappelé M. le président dans sa présentation, elle n’est pas sans inconvénients, notamment au moment des vendanges par plus de 30°C qui mettent à mal la santé du personnel et la qualité du raisin. Et paradoxalement, elle augmente le risque de gelée printanière sur des vignes qui « débourrent » trop tôt.
Ce constat étant fait deux stratégies sont mises en place, l’atténuation et l’adaptation.
La première consiste à diminuer les émissions de CO2, par exemple en allégeant les bouteilles (gain à la production et lors du transport) ou en stockant le carbone dans le sol en broyant sur place les déchets de taille.
La seconde passe notamment par la recherche par croisements de nouvelles variétés de vignes, processus très long et délicat, de nouvelles façons culturales, l’adaptation des horaires de travail des vendangeurs et même l’emploi de caisses blanches qui limitent l’échauffement du raisin coupé.
Parmi les nombreuses questions de l’assistance auxquelles M. Pauthier répond avec assurance et une pointe d’humour, le climato scepticisme, les vignes en Angleterre ou la « délocalisation de la Champagne », enfin l’irrigation, si bien que le mot de la fin revient à un auditeur qui estime qu’à ce train l’eau, du fait de sa rareté, va devenir plus chère que le champagne !